Le Professeur Degos, neurologue à l’hôpital Avicenne à Bobigny, nous explique un phénomène peu connu mais très fréquent et très invalidant dans la maladie de Parkinson, la perte involontaire de salive. Nous vous proposons de comprendre les mécanismes en jeu ainsi que les actions qui peuvent être mises en place pour limiter et traiter ce trouble afin de faciliter la qualité de vie et la vie sociale des patients et des aidants.
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Retranscription de l’interview du Pr Degos du 8 janvier 2024
La sialorrhée est une accumulation excessive de salive dans la bouche qui s’accompagne d’une perte involontaire de cette salive hors de la bouche par un défaut d’élimination de la salive.
Il ne faut pas la confondre avec l’hypersalivation qui est une augmentation de production de salive, sachant que nous produisons quotidiennement 1 à 1,5 litre de salive.
La sialorrhée, jusqu’à présent classée dans les troubles non-moteurs de la maladie de Parkinson, est en fait clairement due à un trouble moteur de la maladie de Parkinson.
Comme vous le savez, dans la maladie de Parkinson il y a un ralentissement du mouvement et ce ralentissement touche également le mouvement de déglutition. Si vous déglutissez moins fréquemment au cours de la journée, c’est tout autant de salive qui n’est pas déglutie et qui risque d’être évacuée en dehors de la bouche générant un « bavage ».
Il ne s’agit pas d’un excès de production de salive, mais d’un défaut de clairance de la salive c’est-à-dire un défaut de déglutition de la salive qui sort alors par la bouche.
Il a été noté dans certains articles scientifiques qu’il y aurait même une diminution de production de salive dans la maladie de Parkinson, montrant ainsi que ce n’est pas un excès de production de salive qui est à l’origine du phénomène de sialorrhée.
En plus du ralentissement de la déglutition, deux autres phénomènes peuvent participer au bavage observé chez les patients :
La sialorrhée est mal connue et mal prise en compte, pourtant ce phénomène est très fréquent. Dans les études, en moyenne 50 à 55 % des patients atteints de la maladie de Parkinson ont présenté ou vont présenter une sialorrhée.
Sa fréquence est importante et il faut en tenir compte, car la sialorrhée est extrêmement invalidante dans le quotidien des patients.
La sialorrhée, et a fortiori le bavage, ont des conséquences importantes chez les patients atteints de la maladie de Parkinson comme :
La sialorrhée a donc un impact très négatif sur le quotidien des patients.
Enfin, si la quantité de salive produite par jour (soit 1 à 1,5 litre) n’est pas déglutie, c’est autant d’eau qui n’est pas ingérée et peut conduire à une déshydratation des patients.
Pour prévenir et limiter la sialorrhée il existe plusieurs outils.
Les outils non médicamenteux comme la kinésithérapie, pour inciter le patient à avoir une posture la plus normale possible en luttant contre le corps penché en avant facilitant le bavage, et également l’orthophonie, pour travailler la déglutition et ainsi limiter la sialorrhée et le bavage.
Les thérapies médicamenteuses vont, elles, limiter la production de salive. Ces traitements par voie générale sous forme de comprimé peuvent, comme tout traitement, avoir des effets indésirables néfastes pour le patient, comme par exemple de la confusion ou des hallucinations.
Il existe également des traitements injectables localement au niveau des glandes salivaires afin de limiter la sécrétion de salive.
La sialorrhée, et a fortiori le bavage, sont des troubles qui font partie intégrante de la maladie de Parkinson, sont extrêmement invalidants et impactent la qualité de vie.
Il faut les prendre en charge. Pour cela il existe des centres spécialisés experts dans la maladie de Parkinson qui peuvent proposer des traitements très spécifiques notamment les injections permettant la réduction de la production de salive.
Les propos tenus sont sous la responsabilité de leur auteur.
BD déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt en lien avec le texte publié.
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