Retranscription interview vidéo du 23 mars 2023
« La prescription universelle pour la maladie de Parkinson, c’est l’exercice »
On peut se poser la question de quel type d’activité physique privilégier quand on est atteint d’une maladie de Parkinson. Quel type, à quel rythme, quelle fréquence, avec quelle intensité ? Ce n’est pas évident de s’y retrouver.
Nous avons bien compris l’importance de l’activité physique régulière pour vivre au mieux sa maladie de Parkinson.
Sachant que l’activité physique est définie1 comme tout mouvement corporel produit par les muscles qui entraîne une dépense énergétique, et qui peut être mesurée en kilocalories2 (par exemple le jardinage, les tâches ménagères, etc.).
L'activité physique dans la vie quotidienne peut être classée en activité domestique, professionnelle, sportive, ou autre…. Tout compte !
L’exercice physique dont on va parler ici plus précisément est une activité planifiée et répétée dans le but d'améliorer sa forme physique.
On peut maintenant se poser la question de quel type d’activité physique privilégier pour ces exercices réguliers.
Nous sommes d’accord pour dire que chaque patient est unique.
Il faudra tenir compte de vos symptômes, de vos goûts et préférences. Le plaisir est important, non seulement dans le cadre d’une certaine philosophie du bonheur, mais aussi, de façon plus prosaïque, pour la synthèse de « bons » neurotransmetteurs et pour que ce plaisir soit un moteur de motivation pour maintenir de vos activités sur le long terme.
La maladie ne donne pas la même association de symptômes à chacun et ces symptômes peuvent survenir plus ou moins tôt dans l’évolution de la maladie ; rigidité plus ou moins présente, instabilité, hypotension orthostatique ou non, fatigabilité plus ou moins présente, parfois des troubles cognitifs, etc. Mais quelle que soit l’évolution de la maladie physique, l’activité physique a sa place3. Comme le dit le Dr Jay Alberts dans son article de 2022 « La prescription universelle pour la maladie de Parkinson, c’est l’exercice. »
Certains évoquent l’importance de débuter au plus tôt l’activité physique lorsque l’on a une maladie de Parkinson4 , bien sûr, mais à tout moment c’est important.
Si vous êtes alité pour une raison ou une autre, le maintien d’une activité physique même assis ou sur le plan du lit sera important.
« Il faut varier les types d’exercice »
Nous avons vu précédemment que des exercices différents pouvaient avoir un effet bénéfique sur différents symptômes. Ainsi, il faut varier les types d’exercices que vous pratiquez et favoriser les exercices qui font bouger tout le corps. Il faut alterner entre des exercices d’endurance, de souplesse ou d’étirements et de renforcement musculaire.
Certaines activités ont fait l’objet d’études : le Qi Gong, le stretching, le tai- chi, le tango, le Pilates, la marche nordique, le tapis roulant, la Zumba5, le yoga, mais également tous types d’autres activités sont possibles : l’entrainement en gymnase, le judo, l’aquagym, la marche, la capoeira, la kinésithérapie…
Concernant la natation en mer, je conseille à mes patients de ne jamais la pratiquer seul, par prudence.
Si on est sédentaire, il est recommandé de faire évaluer sa condition physique par un professionnel de santé ou un professionnel d’activité physique avant de s’engager dans un programme d’exercices. Ce dernier établira un programme qui respectera votre condition physique, les objectifs de chacun pour permettre une pratique en toute sécurité.
Par exemple, le kinésithérapeute va pouvoir analyser vos atouts et les points à travailler comme, par exemple, le travail de la posture, de l’équilibre, un travail de dissociation des ceintures ou de réentrainement à l’effort, et parfois le travail de la respiration.
« Une activité modérée et prolongée »
Récemment, plusieurs grands essais cliniques soutiennent l'utilisation de l'exercice aérobie, en particulier l'exercice aérobie d’intensité modérée à élevée en définissant des objectifs pour permettre une pratique en toute sécurité, afin d’améliorer les symptômes moteurs dans leur globalité.
L’exercice aérobie est un exercice d’endurance, et l’intensité modérée est une intensité d’effort qui entraîne un certain essoufflement et une sudation modérée, avec le maintien de la possibilité de parler pendant l’exercice. L’activité physique d’intensité modérée peut durer plus de 30 minutes.
Lors d’une activité physique d’intensité élevée, l’essoufflement est très important, la transpiration très abondante, la conversation le plus souvent impossible et l’activité ne peut pas être maintenue plus de 10 minutes.
Ce que l’on cherche est plutôt une activité modérée et prolongée (d’endurance).
Le tai-chi, le golf, le stretching, correspondent le plus souvent à une activité physique d’intensité faible ; pour autant il ne faut pas les négliger car ils ont des avantages sur des fonctions comme l’équilibre, le bien-être et donc à poursuivre si cela vous plait.
La marche nordique, l’aquagym, la danse non acrobatique, le ski de fond, le cyclisme, l’aquabiking, correspondent à une activité modérée ou même élevée. Tout dépend de l’intensité avec laquelle ils sont pratiqués.
« Répartir l’activité 3 à 5 jours par semaine »
Une activité physique régulière, pluri-hebdomadaire, adaptée à ses symptômes et à ses préférences est fondamentale et doit devenir une routine.
La fréquence va être basée sur des recommandations.
L'Organisation Mondiale de la Santé et l’American College of Sports Medicine recommandent, au minimum, que les personnes âgées (de plus de 65 ans) fassent au moins 150 minutes d'exercice aérobie d'intensité modérée par semaine ou au moins 75 minutes d'exercice d'intensité élevée (voir définition plus haut).
Par contre le modèle du « weekend warrior » n’est pas recommandé. Ce modèle consiste en une activité physique pratiquée une à deux fois par semaine avec une intensité modérée à élevée et un volume très important.
Il est préférable de répartir l’activité dans un entraînement cardiorespiratoire d'intensité modérée pendant plus de 30 minutes, 3 à 5 jours par semaine pour un total de plus de 150 minutes par semaine.
« Il ne faut pas se décourager si on n’a pas une âme de grand sportif ! »
Malgré ces recommandations, la grande majorité des personnes âgées de plus de 65 ans en bonne santé n'atteignent pas ces niveaux d'activité. Bien sûr, si le patient peut appliquer ces recommandations, c’est parfait.
Toutefois, chez les patients parkinsoniens, des études ont démontré l'efficacité de l'entraînement aérobie d’intensité modérée, 3 fois par semaine, de 30 à 60 minutes à chaque fois. Ce niveau d’exercice est déjà suffisant pour améliorer la qualité de vie, les symptômes physiques et psychiques. Ceci, encore une fois, de façon régulière et, si possible, en plus des activités quotidiennes dont la marche fait partie.
Parfois, chez les patients la pratique d’une telle activité est rendue difficile par la fatigue ou par les capacités physiques. Pas de panique, la persévérance est encore une fois très utile. Une activité physique, quelle qu’elle soit, sera bénéfique. Il ne faut pas se décourager si on n’a pas une âme de grand sportif ou d’appétence particulière pour l’activité physique : après quelques séances, le bénéfice ressenti va devenir un moteur. Je l’ai constaté chez mes patients qui n’étaient du tout sportifs au départ.
Une augmentation progressive de la durée, du nombre des séances permet d’atteindre plus facilement ses objectifs.
« Chez certains sujets très sédentaires, une activité physique, même de faible intensité, peut être bénéfique pour la santé. »
La Haute Autorité de Santé (HAS) rappelle qu’il existe une relation dose-réponse positive entre l’augmentation de l’intensité de l’activité physique et les bénéfices pour la santé.
Il existe cependant une intensité minimale pour avoir des effets bénéfiques sur la santé : en-dessous d’un certain seuil, l’activité physique ne sollicite pas suffisamment l’organisme pour entraîner des modifications physiologiques (plasticité cérébrale, etc.). Mais ce seuil minimal semble variable selon les individus. Il dépend, pour un individu donné, de sa capacité cardiorespiratoire maximale, de son âge, de son niveau habituel d’activité physique et de son état de santé. Il dépend aussi des différences physiologiques et génétiques entre les individus. Ainsi, chez certains sujets très sédentaires, une activité physique, même de faible intensité, peut être bénéfique pour la santé.
À l’inverse, au-delà d’une certaine intensité, les effets supplémentaires deviennent limités, tandis que les risques augmentent (tendinites, etc.), même si le bénéfice final reste toujours favorable à l’activité physique. Il faut respecter ses possibilités et ses douleurs afin de ne pas induire de complications, comme des tendinites ou autres, qui pourraient alors limiter à plus long terme la pratique d’une activité physique.
- Wu PL, Lee M, Huang TT. Effectiveness of physical activity on patients with depression and Parkinson's disease: A systematic review. PLoS One. 2017 Jul 27;12(7):e0181515. doi: 10.1371/journal.pone.0181515. PMID: 28749970; PMCID: PMC5531507.
- Caspersen CJ, Powell KE, Christenson GM. Physical activity, exercise, and physical fitness: definitions and distinctions for health-related research. Public health reports. 1985;100(2):126–31. [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
- Alberts JL, Rosenfeldt AB. The Universal Prescription for Parkinson's Disease: Exercise. J Parkinsons Dis. 2020;10(s1):S21-S27. doi: 10.3233/JPD-202100. PMID: 32925109; PMCID: PMC7592674.
- Ellis TD, Colón-Semenza C, DeAngelis TR, Thomas CA, Hilaire MS, Earhart GM, Dibble LE. Evidence for Early and Regular Physical Therapy and Exercise in Parkinson's Disease. Semin Neurol. 2021 Apr;41(2):189-205. doi: 10.1055/s-0041-1725133. Epub 2021 Mar 19. PMID: 33742432; PMCID: PMC8678920.
- Delextrat A, Bateman J, Esser P, Targen N, Dawes H. The potential benefits of Zumba Gold(®) in people with mild-to-moderate Parkinson's: Feasibility and effects of dance styles and number of sessions. Complement Ther Med. 2016 Aug;27:68-73. doi: 10.1016/j.ctim.2016.05.009. Epub 2016 Jun 2. PMID: 27515879.
Déclaration d’intérêts :
CB déclare ne pas avoir de conflit d’intérêt en lien avec le texte publié.
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